Changements entre les éditions
Le premier épisode de S.O.S. Météores paraît dans Tintin (édition belge) le 8 janvier 1958, et le 20 février dans l'édition française. L'album paraîtra en septembre 1959 au Lombard. Entre l'édition originale de 1959, celle de 1972 et celle de 1989 on remarque de nombreux changements. Lors de la parution dans le journal Tintin, Olrik apparaît à visage découvert dans la scène de l'étang. Jacobs modifiera son apparence dans les éditions suivantes en le grimant d'une moustache et de lunettes, afin que l'on ne découvre sa véritable identité qu'avec Blake, 28 pages plus loin.
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Jacobs, mécontent des couleurs des divers retirages de ses albums par les Editions du Lombard, a fini par créer sa propre maison d'édition "Editions Blake et Mortimer" en 1983. Il a également monté en 1986 un "studio Jacobs" à l'image du "studio Hergé", ayant pour tâche de renouveler la colorisation des albums, et a laissé des directives avant sa mort pour permettre l'édition du deuxième tome des trois formules du Pr Sato. L'édition de 1989 paraît donc après la mort de Jacobs. L'impression générale est effectivement que la couleur des vignettes a été revue avec soin: des détails de couleurs sont rajoutés, les couleurs un peu fluctuantes au fil des pages de la première version sont stabilisées, un grand nombre d'erreurs ont été corrigées. Le format est plus grand, et le lettrage a été refait intégralement. Mais au delà de ce travail de correction de détail interviennent des changements plus significatifs, qui montrent un souci de modification globale de l'atmosphère de l'album. Ainsi les couleurs du ciel sont beaucoup plus lourdes, plus artificielles : le bleu soutenu (p3 à 6) remplace le gris (voir la Concorde ci-dessous), ne permettant plus de faire la distinction entre le jour et la nuit (p6).
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Les couleurs des "récitatifs" (si jacobsiens) ont également été modifiées : l'orange est fortement réduit au profit du bleu et du rose, et également du jaune et du violet. Les couleurs anecdotiques (vert, rouge) disparaissent. Le blanc est dans les deux cas involontaire.
couleur des récitatifs |
rouge |
orange |
rose |
jaune |
vert |
bleu |
violet |
gris |
blanc |
Météores 1959 et 1972 |
0.2% |
47.0% |
1.5% |
30.2% |
0.2% |
15.9% |
3.1% |
0.5% |
1.3% |
Météores 1989 |
0% |
23.4% |
9.6% |
34.9% |
0% |
24.3% |
6.1% |
1.3% |
0.3% |
Sato T1 1990 |
0.4% |
31.8% |
3.1% |
31.0% |
3.1% |
14.1% |
9.7% |
6.6% |
0% |
Cette nouvelle gamme de couleurs se rapproche davantage de celle de Sato T1 qui comporte en gros un tiers de jaune, un tiers d'orange-rose, et un tiers de bleu-violet-gris. Cependant ce dernier album comporte beaucoup moins de récitatifs (226 contre 602) du fait d'un nombre plus faible de vignettes par planche. Il se distingue également par des bulles de dialogues colorées, exceptionnelles dans S.O.S. Météores. On peut penser néanmoins que Jacobs a émis le souhait d'une certaine harmonisation des couleurs dans ses différents albums.
Les
corrections
Couleurs
Il y a bien sûr des corrections de détails. La
chemise jaune que Mortimer arbore à la première page de
l'album (p3) devenait blanche p4 et 5 avant de retrouver sa couleur
d'origine p8. Ce n'est plus le cas dans la version de 1989. De
même, la chemise blanche d'Ernest en début de
récit (p6) devenait étonnamment grise p58. elle est
maintenant gris-vert.
Dans la version de 1959, la couleur de la cravate de Mortimer
était assez variable (du jaune citron au jaune d'or entre les
pages 13 et 17) et différente de celle (marron) que lui avait
prêté Labrousse la veille, ce qui est un peu
étonnant. Elle redevient uniformément marron dans la
nouvelle version.
Un liseré rouge apparaît sur le pantalon du
garçon de courses de la banque de France (p56, 2ème
bande).
La boue réapparaît sur l'imperméable de Mortimer
(p10, bande 2, 1ère vignette).
Les appareils faisant partie de la salle de contrôle
apparaissaient jaunes p52 alors qu'on les voyait gris à la
page précédente. Ils sont maintenant
uniformément gris.
Le taximètre extérieur n'apparaissait pas sur la vue en gros plan de la p7 (bande 1, 1ère vignette et bande 3, vignette du bas). On le retrouve dans la nouvelle version. La calandre de la Ford Custom n'apparaissait pas abîmée sur une vignette, elle a depuis retrouvé ses bosses ! Dans le même ordre d'esprit, la vignette de la p53 où l'on voyait Miloch une cigarette au bec ...et une à la main, a été corrigée.
Certains détails architecturaux sont modifiés, en particulier la couleur des toitures. Aux Loges (p16, voir ci-dessous), la maison de droite qui est effectivement couverte de tuiles retrouve un toit de cette couleur, comme d'ailleurs les maisons du haras de Vauptain (p17, 3ème bande, 1ère image). La maison de Labrousse (p16) retrouve également un toit rouge plus exact et sa voisine perd sa couleur bleue peu réaliste (p33, 2ème bande, 2ème image).
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De nombreux changements sont de nature esthétique :
des couleurs sont ajoutées de façon à rendre l'image plus
complexe avec un meilleur rendu comme par exemple à l'étang de
la Geneste.
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Lettrage, onomatopées.
De manière générale, on constate un certain
laisser-aller dans les éditions intermédiaires comme
celle de 1972 par rapport à l'édition originale de
1959, ce qui permet de comprendre la colère de Jacobs et sa
volonté de remédier à cela en créant sa
maison d'édition.
Ainsi, le fourgon postal de Louis comporte la mention "POSTES" en
jaune sur fond vert. Dans l'édition originale, cette mention
est généralement correctement dessinée (que ce
soit dans le journal Tintin comme dans la première
édition du Lombard), même si quelques erreurs existent
(mention POSTE et non POSTES à la p17). Dans la version de
1972, cette inscription est souvent mal dessinée, avec un
détourage qui ne s'accorde pas avec la couleur (p6,
3ème bande, p7 1ère bande, p17 2ème bande, p34
1ère et 4ème bande, p36 2ème bande, p37
4ème bande) ou est simplement oubliée (p17 4ème
bande, p37 3ème bande). A la page 7, on avait même un
détourage noir "POSTES" superposé à des lettres
jaunes marquant le mot "CORREO", alors que l'édition originale
est correcte. L'éditeur aurait-il mélangé les
planches des versions françaises et espagnoles? Tout ceci sera
corrigé dans la version de 1989.
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L'inscription "BILLETS" à la gare des Invalides (p4) et le "TOC TOC" de Sharkey à la porte d'Olrik (p49) étaient devenues presque invisibles en 1972 et redeviennent lisibles. De nombreuses indications (panneaux, inscriptions sur les bâtiments) réapparaissent : A la station Massy-Palaiseau, on distingue le panneau "1 CLASSE" p38 (illisible dès la parution en album), et la station cité universitaire a retrouvé son nom sur le quai (p39, 2ème bande, 2ème vignette bas, disparu en 1972). A la station Port-Royal, on voit un panneau "SORTIE" sur les quais (p40, 2ème bande, 1ère vignette) et l'indication "LIGNE DE SCEAUX" sur le bâtiment extérieur (p41, 1ère vignette) comme dans l'édition originale.
Dans la version actuelle, le "P" sur la veste de Louis est mieux
dessiné (p33 dernière vignette), le service secret
britannique s'appelle bien MI5 et non plus IM5 (p35, 2ème
bande, dernière vignette).
Les dialogues du brigadier de gendarmerie et de Mortimer
inversés (p13) sont rétablis. De même, la
position des "bulles" du dialogue Miloch - Mortimer qui était
erronée p52 (1ère vignette de la 3ème bande) est
modifiée.
On notera que le mot FIN situé entre les mains d'Olrik
derrière les barreaux a été
déplacé dans la nouvelle version, ce que
personnellement je regrette.
Les erreurs introduites
couleurs instables
Il arrive que des couleurs varient en cours d'histoire. Ainsi, le facteur Louis perd ses galons rouges (p6) et les retrouve p17. Le cadre du miroir dans le salon de Labrousse n'est pas colorié de façon homogène p10 et p13. La couleur de la cravate de Pradier change au cours de la page 26. Labrousse a des cheveux brun-gris p10, très bruns p11 à 17, p21, p25 à 32, puis très gris p48 (c'est sans doute l'émotion que lui a causé Sharkey...). De même, les murs de la loge de la concierge du 69 bis rue de Vaugirard sont orange p27 et de couleur prune p41. Ils restaient orange dans la première version. La carte murale du bureau de Pradier a changé de couleur entre les deux versions. Le problème, c'est que ses couleurs varient aussi entre les pages 24, 25, 26, et 48. Pourtant Jacobs avait fait attention à ce détail puisque dans "l'affaire du collier " on retrouvait le même plan que dans S.O.S Météores dans le même bureau de Pradier (L'affaire du collier p30).
oublis
Des oublis peuvent être également signalés. Ainsi, le panneau stationnement interdit perd sa couleur bleue p17 (2ème bande, dernière image). Les cheveux de Blake sont blancs p33. Les légendes de la carte de Miloch p52 ont disparu. Ce peut être volontaire, car après tout il est peu probable d'écrire en toutes lettres "Front polaire pacifique" sur une carte murale. Mais il s'agit plus probablement d'un oubli, comme d'ailleurs p53 : supprimer les indications "GENERATEUR, ELECTRODES, ACCUMULATEURS, EMETTEURS, PUPITRE, COMMUTATRICE" sur le synoptique de la station-pilote 001 (dernier dessin de la 3ème bande) rend le schéma assez obscur. De plus on sait que Jacobs aimait beaucoup ce genre de dessin permettant une justification scientifique (voir le schéma du télécéphaloscope de "la marque jaune" p55, et celui de la chaîne de parthénogenèse électronique dans "les trois formules du Pr Sato T1" p31). On ne voit pas pourquoi il s'en serait privé ici.
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colorisation intempestives
Certains ajouts de couleur sont malheureux. Ainsi, la chemise du
radio de l'aérodrome de Toussus-le-Noble est passée du
blanc au kaki entre les deux versions. Une telle couleur ne peut se
justifier puisque l'aérodrome est civil, et le port de
chemises kaki au travail peu courant dans les années 50,
où le blanc était de rigueur.
Le chauffeur de Pradier est devenu basané dans la nouvelle
version (p56). Pourtant il s'appelle Vidal !
La rivière a disparu du plan situé dans le bureau de
l'officier à Satory.
Les tomates lancées par les CRS (p57) étaient rouges en
1959, brunes en 1972, vert-foncé en 1989.
Le panneau "chemin de la Geneste" change de couleur. Jaune p19, vert
p62 et 64. Dans la version de 59 il était jaune p19. Son
apparence verte pouvait s'expliquer par les conditions de fin du
monde p62, et il retrouvait une couleur jaune-marron p64.
Erreurs vénielles me direz-vous, mais d'autres sont plus
importantes : la boule de feu apparaît en couleur sur la
télévision de Labrousse p12. Cette télévision est évidemment en
Noir et Blanc, comme on le voit sur d'autres images de cette
même page. D'ailleurs, le début officiel de la
télévision couleur en France date du 1er octobre 1967
à 14h15, une dizaine d'années après la parution
de l'album. Il n'y avait alors que 1500 récepteurs
couleur.
On peut remarquer que ces boules de feu redeviendront blanches p 62 lorsque
la station s'autodétruira. Elles sont également blanches sur la
couverture de l'album. Cette couleur est plus conforme à
l'idée que l'on peut se faire de l'éclair en boule.
Autre erreur : des couleurs variées apparaissent sur une carte d'état-major p54, alors que ce type de cartes est plutôt réputé pour son côté austère.
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version 1972 |
version 1989 |
carte IGN 1959 (photocopie N/B) |
Ces deux colorisations intempestives sont dues au fait qu'au moment de la retouche (1989), la télévision n'existe plus qu'en couleurs et les cartes TOP25 de l'IGN sont beaucoup plus attractives que les cartes d'état-major de jadis.
Les erreurs restantes
Vous découvrirez en explorant les pages de ce site celles qui sont liées à la topographie des lieux (par exemple à la Madeleine, puis lorsque la poursuite de Blake par Sharkey commence, à la gare de Jouy, à Igny, à la station du Luxembourg, dans le château de Troussalet, au village de Buc, etc). On peut noter également les incohérences dans la description de l'action dans le temps (voir cette page). Sur le plan du scénario, on peut s'étonner que Blake reconnaisse Sharkey de loin dans la foule et l'identifie comme son poursuivant, alors que Mortimer ne se souvient pas de lui. Du point de vue scientifique, il y a bien sûr des "erreurs", mais c'est le jeu de la science-fiction. Cet aspect est discuté dans la partie météo à la page modifier volontairement le temps.
D'autres erreurs assez mineures n'ont pas été
corrigées. Au niveau ferroviaire, Jacobs a confondu le matériel
ferroviaire des lignes de Saint-Lazare et de la Grande Ceinture (voir la page
Gare d'Igny). Dans le même ordre d'idée,
la première vignette de la page 38 comporte un signal de position d'aiguille
appartenant à la signalisation allemande (lettre de D.Brocheton, chef
de documentation à La Vie Du Rail à Benoît Verley, 18/11/97).
Une erreur sans doute, à moins que ce signal ne date de l'Occupation
?
Le panneau TRAVAUX à Buc est différent la nuit (p6,
dernière vignette) et le jour (p17, avant-dernière
vignette). Dans l'édition originale, il comportait juste la
mention "TRAVAUX" p6, alors que p17 ce même panneau comportait
un sur-titre mentionnant le nom du département (SEINE). En
1972 la mention SEINE a disparu des deux images (ce qui est
cohérent), tandis qu'en 1989 on voit cette mention sur la
seule vignette de la p6.
La chemise de Sadi, à carreaux sur les images de la p55, devient unie
p57. Jaune dans la version de 1959, elle est brune en 1989 mais perd toujours
ses carreaux.
Ernest et Mortimer quittent la section C p60 alors que Mortimer
était a priori enfermé dans la section D (cf. p54). Le
pull d'Ernest n'est pas toujours clairement dessiné (p59
1ère vignette, à comparer avec la p60).
Une erreur amusante signalée par un lecteur de Bo-Doï (cf
sources) : le téléphone
apparaît fort opportunément sur le bureau de Pradier p25
lorsque Blake veut téléphoner, alors que le même
bureau en est dépourvu quelques images plus haut (p24).
Vous en trouverez sûrement d'autres... mais est-ce si important?