Situation dans le temps

L'époque

La première planche de SOS Météores a paru le 8 janvier 1958. L'action peut être située dans la période 1947-1958, même si aucune mention de l'année n'est faite, comme toujours chez Jacobs. Chez Labrousse, Mortimer boit un Pomerol 1947, et compte-tenu de "la vieille hospitalité française" il est peu probable que le directeur de la Météorologie Nationale ait servi au Pr Philip Mortimer un vin de l'année (quoique d'un excellent millésime, dû à un très bel été 1947). De plus, les actualités télévisées qu'ils regardent ensemble ont commencé en octobre 1949 ce qui exclut toute année antérieure.
Jacobs a conçu le scénario de l'album à la suite des perturbations météo de 1954. Une étude des données météorologiques ne permet pas de proposer une seule année avec certitude: 1951, 1952, 1954, 1955, 1956 voire 1958 peuvent être retenues à divers titres comme l'année de l'action.

La saison

La première vignette situe la saison : "Après un hiver long et meurtrier, le dégel a enfin commencé" sur fond de coupures de journaux dont la plus récente est du 6 mai. Nous sommes donc au printemps. D'ailleurs, si quelques arbres sont sans feuilles (à la Madeleine, à la porte de Buc, aux Arcades, au déversoir , au collège St Nicolas d'Igny) la grande majorité des végétaux présente un beau feuillage vert (à la porte de Buc, à l'étang de la Geneste, au haras de Vauptain, au château de Troussalet, au jardin du Luxembourg...). En revanche, pas une fleur : le printemps se fait attendre.

Le mois

Mortimer arrive à Versailles à 19H. Il ne faut pas plus d'une demi-heure, grand maximum 40 mn en roulant lentement pour arriver à Buc au niveau du village, au moment où la nuit tombe. Entre 1946 et 1976, la France ne connaissait pas l'heure d'été, et l'heure légale avait un décalage d'une heure avec l'heure de Greenwich (TU+1). Le 8 mars, le soleil se couche à 18H43, le 8 avril à 19H29, le 8 mai à 20H14. Nous sommes probablement en mars ou avril. En mai, la durée du jour serait trop longue : lorsque Mortimer retourne à Troussalet après avoir téléphoné à Labrousse au café, la nuit tombe rapidement (et il n'est probablement pas 20H30). La poursuite sur les toits parisiens se passe également à la tombée de la nuit, et l'action veut qu'il ne soit pas tard dans la soirée. Le 11 au matin quand Sharkey va chercher Mortimer, il fait nuit, et on peut douter qu'il soit 5H17 (mai): 6H11 est plus vraisemblable (avril), 7H15 (mars)encore davantage.

Le jour

Lorsque Labrousse déchiffre le message codé de la Scandinavia, il nous indique que nous sommes le 10. C'est déjà le troisième jour de l'action qui a donc débuté le 8 et qui finira le 13.

Le jour de la semaine

Blake nous indique que le 8 est un mardi lors de la première réunion à la DST. Quand Mortimer et Labrousse regardent les informations télévisées (le 8), celles-ci font allusion a des évènements ayant eu lieu le vendredi et dans la nuit de samedi à dimanche. Il est un peu étonnant de ne pas avoir d'informations plus récentes. Le lendemain mercredi, Labrousse ne travaille pas, mais il a pu prendre un jour de congé.

A la page 48, des vendeurs de journaux proposent Libé(ration) et (Le journal du) Dimanche, relatant la chasse à l'homme sur les toits de la rue de Vaugirard qui a eu lieu dans la nuit précédente. Nous devons être le 11 au matin, la parution dans les journaux nécessitant un délai d'impression. Jacobs nous donne d'ailleurs une idée de ces délais dans "la marque jaune" p15, où l'on apprend que le journal Daily Mail doit être bouclé à minuit s'il veut être dans les kiosques à l'heure le lendemain matin. Le journal du Dimanche publie en Une: "catastrophe sur Paris ce soir" alors qu'il ne peut s'agir que de la veille. Ce qui est un peu étonnant. Et que nous soyions jeudi 10 ou vendredi 11, ce n'est pas jour normal de parution pour Le journal du Dimanche.
Ces deux journaux sont relativement récents. Il faut dire que presque tous les journaux et périodiques ayant paru sous l'occupation allemande ont été frappé d'interdit par les ordonnances du 20 Août et du 30 Septembre 1944. Libération, journal d'Emmanuel d'Astier de la Vigerie date de 1944 et durera 20 ans avant que le titre n'en soit repris par Serge July en 1973. Le journal du Dimanche date de 1948. Mais dans les années 50, les principaux quotidiens sont France-Soir (plus d'un million d'exemplaires en 1953) et Le Parisien.
Le crieur de journaux a sous le bras un (autre?) journal ayant pour titre "La cour d'Angleterre" et en gros "ELISABETH". Le couronnement de la reine d'Angleterre, le 2 juin 1953, sera un événement. Il sera pour la première fois retransmis en direct à la télévision. D'après D.Van Kerckhove (dans le monde de E.P.Jacobs, voir sources) des dizaines de milliers de gens dans le monde entier achetèrent leur première TV dès 1952 pour voir le couronnement (George VI étant mort en février 1952).

En conclusion : l'année

Mardi 8 mars 1955, mardi 8 avril 1952, mardi 8 mai 1951 ou 1956, mardi 8 avril 1958 restent les 5 dates possibles. Comme 1955 était une année à hiver doux, il nous reste 1951, 1952, 1958 (pluvieuses) et 1956 (froide). L'heure du coucher du soleil nous incite à préférer Avril à Mai, même si ce n'est pas cohérent avec la coupure de journal de la première vignette, et donc à proposer le mardi 8 Avril 1952 comme départ de l'action, date compatible avec l'allusion à la reine Elisabeth.

Un internaute, Thomas Wojczewski, me signale d'autres éléments qui lui font préférer l'année 1958 : D'abord, SOS Météores est situé après La Marque Jaune, et par conséquent après décembre 1953. Ensuite, cette histoire se déroule dans la même année que Le Piège diabolique ("quelques mois" seulement séparent la destruction de 001 de la mort de Miloch), à la fin duquel une femme s'exclame: "Un spoutnik!?"(planche 60). Or, le premier spoutnik ne fut lancé qu'en octobre 1957; il n'y a donc que 1957 ou 58 comme années possibles, ce qui exclue aussi mardi 8 mai 1956... Etant donné que le printemps 1957 ne comporte pas de mardi 8, force est d'accepter mardi 8 avril 1958 pour le début de SOS Météores... à moins d'opter pour mardi 8 juillet 58, ce qui concorderait avec le 6 mai mentionné sur la première case de l'album.

D'autres visiteurs du site, Roch Tonglet et Marc Pratlong ont étudié les caractéristiques des différentes voitures qui parsèment l'album (voir le détail de cette passionnante analyse à la page voitures). Leurs conclusions sont formelles : compte-tenu des modèles rencontrés, seule l'année 1958 est possible.

Il faut donc opter pour l'année 1958. Météorologiquement parlant, elle est certes pluvieuse, mais pauvre en événements catastrophiques. Elle a le mérite d'être l'année de parution dans Tintin. Mais dans ce cas, la publication dans ce journal (dès janvier) aurait précédé de quelques mois le déroulement des faits.