On peut légitimement supposer que l'idée du M sur l'imper de Blake est une réminiscence de "M le Maudit", film tourné par Fritz Lang en 1931. Le dessin où Mortimer aperçoit le M sur l'épaule de Blake rappelle d'ailleurs la fameuse scène où Peter Lorre découvre horrifié cette marque d'infamie sur son manteau...
Le symbole du M entouré est plus difficile à
expliquer. C'est à la fois un µ (mu grec, symbole de micro)
et une allusion au M (Méga) des ondes Méga (megawave). On
peut aussi penser aux différents signes composés d'un caractère
entouré, comme @ : Arobas ou Ar(r)obe. Ce caractère s'est
répandu grâce à l'informatique mais il est ancien
: il s'agit de la ligature latine de "ad" (en français : à)
où le a et le d ont fini par se confondre. Ce caractère
était surtout utilisé aux Etats-Unis pour indiquer le prix
unitaire, par ex : 2 books@$1. Le mot arroba qui désigne une unité
de poids espagnole ou portugaise (en 1555) est d'origine Arabe. S'il n'est
pas sûr que Jacobs ait jamais vu ce signe, il a pu rencontrer plus
vraisemblablement © (copyright) ou ® (registered : marque déposée).
Et il a certainement vu le logo des chemins de fer Belges, un B à
l'intérieur d'un ovale...
Quoi qu'il en soit, la ressemblance avec le signe @ n'a pas échappé
au journal Spirou (n°3143, 8 juillet 98).
Différentes marques jaunes ont pu influencer Jacobs, de nombreux M jaunes parcourant Paris, à commencer par ceux du Métro (la version modernisée du logo rappelle d'ailleurs la fameuse marque jaune). Néanmoins les poteaux supportant le M jaune du métro datent de 1970 et n'ont donc pas pu inspirer Jacobs. Actuellement, c'est plutôt le M jaune du Mc Donald's qui se répand dans nos villes. Un autre M entouré ...d'un carré (rouge) : le M de Monoprix.
Signer son forfait d'un symbole caractéristique est un classique du genre : le M traçé à la craie par la Marque Jaune, c'est le "Z qui veut dire Zorro", ou la carte de visite d'un Arsène Lupin. Ce procédé sera d'ailleurs repris par divers groupes terroristes... Le M jaune peut aussi faire penser au S jaune de Superman, en particulier lorsqu'on découvre Olrik avec cette marque sur le buste p 62. Le M est cette fois inscrit dans un cercle parfait. Dans l'édition actuelle, un "Guinea-pig" menaçant et monstrueux arborant la célèbre marque constitue la première image de l'album (p1). On ne peut pas ne pas faire le rapprochement avec un Superman malfaisant. Pour compléter l'allusion, Vernay, Macomber et Calvin prisonniers porteront même un S jaune (pour Serviteur ou Slave ?) sur la poitrine à la page 63.
Quoi qu'il en soit, ce M aura eu du succès, et
sera repris, pastiché, plagié à tout va. Ainsi on
a pu voir le M de la marque jaune au dos d'un livre des Editions Magnard
(Petite fabrique de littérature).
Renault reprendra a son compte "La marque jaune", en utilisant l'album
pour promouvoir sa gamme 1993 dans une plaquette appelée "enquête
sur la marque jaune" (comprendre la marque jaune = Renault).
La une du journal Tintin n°49 du 4 Décembre 1984 consacré
à "EP Jacobs dans le théâtre du mystère" est
un pastiche de la célèbre couverture. La couverture de "un
opéra de papier" également. D'autre part, on peut voir un
faux Buck Danny (rebaptisé Fuck Daddy) dans "La marque rouge" dans
le n°2300 de Spirou. Ce dessin a visiblement inspiré Convard
et Julliard pour la couverture du Figaro Magazine consacrée au
lancement de "la Machination Voronov". Dans "Le Monde de Edgar P Jacobs",
le dossier "La marque Jaune" de D. Van Kerckhove décrit quelques
autres allusions, dont certaines plus sexy, comme "la marque rose" où
Guinea-pig est remplacé par de voluptueuses créatures. Dans
le Bo Doï n°26 de janvier 2000, des jeunes filles remplacent
également nos héros sur la couverture.
Le dessinateur Yslaire a également réalisé un pastiche
de la couverture avec Bidouille et Violette.
L'album anniversaire de Natacha (Editions Marsu Productions) reprend aussi
cette couverture, avec une Natacha très Marylin Monroe...
La dernière campagne d'affiches d'Eddy Mitchell est aussi un hommage
à cette couverture, avec une subtile modification du symbole de
la marque jaune pour qu'un E et un M puissent y être lus. La Marque
Mitchell en quelque sorte.
En juin 2000 on pouvait voir à la Bastille un tract mystérieux portant un signe inspiré de la marque jaune. Stratégie marketing pour le site web urbuz.com qui a d'ailleurs disparu en mai 2002.
L'annonce d'une version cinématographique de La Marque Jaune a donné lieu à l'inévitable pastiche avec cette fois le producteur Charles GASSOT dans le rôle de Guinea-Pig (paru dans Le film français janvier 2001). Et la prépublication en juin 2001 du dernier album de Blake et Mortimer, L'étrange rendez-vous, a donné lieu a une "une" spéciale de Télérama, qui sans constituer un pastiche, reprend l'inévitable Marque Jaune.
En 2002, c'est le festival du film fantastique de Bruxelles qui reprendra la célèbre marque jaune.
Et bien sûr, à l'occasion du vingtième anniversaire de la mort de Jacobs, c'est le M du journal Le Monde qui prendra la couleur jaune...
